L’ethnologie coloniale s’est beaucoup appesantie sur la recherche des origines des sociétés africaines. Née dans un souci de compréhension des sujets coloniaux afin de mieux définir les politiques coloniales, elle a livré une somme considérable d’informations dont les analyses ont débouché sur des vérités provisoires qui prennent souvent, à défaut d’approfondissement de la recherche, le caractère de vérité établie. Les travaux de Louis Tauxier, de Delafosse et de Henri Labouret pour ce qui concerne l’Afrique de l’Ouest, en particulier la partie du Soudan français devenue aujourd’hui la Haute-Volta, sont éloquents à ce sujet.
Je m’attacherai dans le présent travail à montrer comment les analyses de l’ethnologie coloniale, pour critiques qu’elles aient été, corroborent les données de la tradition orale ou s’en écartent sans résoudre le problème des origines. Malgré une définition très positive qu’en a donné Jean-Loup Amselle, l’interprétation ethno-raciale de l’ethnie qui a prévalu dans l’entre-deux-guerres répondaient au souci de la classification qui remonte au XIXe siècle. Les travaux de Tauxier ont réservé une grande place à cette classification avec la distinction entre groupes communautarisés et groupes décommunautarisés. L’ethnologie a-t-elle contribué à inventer les ethnies, comme l’affirmait il y a deux décennies l’école anthropologique française, en en créant de toute pièce ou en les opposant les unes les autres ; en en fractionnant certaines ou en en regroupant d’autres qui n’éprouvent pas forcément le sentiment d’appartenance à un même groupe ? Autrement dit, l’ethnie serait-elle plus une construction identitaire conceptualisée par l’ethnologie coloniale qu’une donnée sociale réelle ?
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